Au berceau des lendemains
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Et tout entière ouverte. Cette île qui n’en peut plus de grimper tous les mornes et de creuser la pulpe des nuits jusqu’au premier cauchemar en guise de baptême. Voyage sans retour, sans aube ni crépuscule. Voyage aveugle puant la déchirure d’une terre ouverte en deux bords d’une mer craquelée de douleurs. Voyage des douleurs mémorables et derrière le dos des vents l’inconnu terrifiant d’un fragment de l’au-delà.
Et puis un jour… Jour d’arrivée mais le temps avait changé et nous les débarqués du gouffre, enchaînés à notre défaite, vaincus de l’autre-bord et comme à jamais vaincus, nous avons vu la terre qui n’était pas nous. Nous avons vu la terre et ce n’était qu’une île. Une senteur d’eau de mer et de couleurs humides et le port accourait avec sa gourmandise de chair fraîche et les dames choisissaient et les hommes achetaient et nul dieu ne protestait contre la vente. Taureaux, génisses, vaches, veaux, bétail marqué, nous regardions les jours impossibles se lever et s’éteindre, s’éteindre et se lever au commandement du maître. Notre folie première était de vouloir retourner, de prendre les bois, de mourir tout vivants mais nous étions contraints d’aller à l’abordage du destin. Les plantations s’ouvraient en inquiétude sourde, les ateliers s’organisaient en soumission menteuse, les châtiments pleuvaient sur la peau et de désespoir nous riions. Partir ! Suivre les plages ! S’enfoncer dans les bois. Partir-quitter. Partir-marronner ! Partir sur les chevaux des dieux ! Enjamber la mer ! Et la musique volait, masquait, démasquait et disait tout l’antan et l’aujourd’hui sans demain. Partir dans les sentiers du conte, reconstruire le cercle d’une parole perdue.
Photographie de couverture : Marvin L. – @macojaune.
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